Transversalité : au-delà de l’effet d’affichage, vivez-la !

Il y a quelques années, la communication mettait à l’honneur les valeurs du cabinet d’avocats telles que l’adaptabilité, la technicité ou encore la disponibilité… Plus récemment, le vocabulaire, jugé très basique, s’est enrichi dans l’optique d’une qualification toujours plus élaborée de la valeur ajoutée offerte par l’avocat à son client pour répondre à ses besoins. Les avocats s’efforcent donc de développer, parallèlement à une approche sur les compétences individualisées, un langage autour du travail d’équipe interne au cabinet, au service du client. Le mot « transversalité » est alors apparu dans tous les supports de communication.

La mise en relation de l’ensemble des compétences des avocats

La transversalité va créer des ponts entre les expertises et les avocats ; des ponts qui permettent de mettre en relation l’ensemble des compétences des avocats du cabinet avec les clients. Ils participent de la volonté de construire un environnement favorable aux échanges, une réponse globale dans le cadre d’un dossier ou d’un deal. Cette construction ne procède pas d’une démarche naturelle, a fortiori au sein des professions libérales où la volonté de liberté est viscérale. Elle est un moyen managérial dont la mise en œuvre vise le décloisonnement des expertises entre elles. Supprimer les barrières, rendre fluides les solutions : tels sont ses objectifs principaux.

Vivre cette transversalité 

Souhaiter la transversalité ne suffit pas, il faut que les avocats s’impliquent dans la démarche. Au-delà d’un effet d’affichage généralisé, il faut vivre cette transversalité !
Vouloir la transversalité, c’est donner les conditions nécessaires au dialogue. Sa mise en œuvre, c’est la coopération. Cette dernière s’inscrit dans le temps, la régularité et la discipline. Elle doit devenir une préoccupation de tous les instants. Pour donner du sens, la transversalité doit offrir une réponse au pourquoi travailler tous ensemble. Elle permet de capitaliser la connaissance des clients du cabinet à l’ensemble des associés. À l’inverse, elle offre aux clients la connaissance de l’ensemble des avocats.
Les avocats ne doivent pas transformer leurs échanges entre associés en une compétition de plus, la transversalité doit être une ressource.
Les atouts utilisés par les avocats auprès de leurs clients doivent s’exercer de la même manière entre associés pour rendre effective la transversalité : écoute, empathie, simplicité, convivialité, honnêteté intellectuelle, reconnaître une erreur, admettre ses limites, mettre en avant ses points forts tout en acceptant ceux des autres…

Avancer concrètement vers la transversalité 

  • Voici quelques règles simples… mais si utiles pour avancer concrètement vers la transversalité : s’assurer que les associés connaissent et comprennent les autres expertises/offres du cabinet, s’assurer que les associés apprécient suffisamment les enjeux et l’environnement de leurs clients pour pouvoir proposer les expertises ad hoc du cabinet et trouver les bonnes   informations auprès des personnes les plus qualifiées pour les fournir (au risque de voir le client s’adresser à plusieurs cabinets au lieu de concentrer ses demandes) ; enfin, fixer un plan d’actions atteignable et peu contraignant :
  • – se réunir tous les mois/6 semaines (avec, si possible, l’ensemble des associés. Si la taille du cabinet ou de réelles animosités internes freinent le process, réunir les expertises qui ont le plus de synergies) et parler clients uniquement (ce qui n’empêche pas de se déplacer dans le bureau d’à côté entre deux réunions de « cross selling » pour échanger sur un dossier…) ;
  • – au cours de cette réunion, chaque associé pourrait évoquer le dossier qui l’occupe et/ou du client qu’il pourrait présenter à d’autres, dans un temps limité afin que chacun s’exprime. Cet exercice consiste à exposer, dans la mesure du possible, les besoins de son client et favorise l’entrée en action d’un associé jusque-là tiers au dossier/à la relation ;
  • – fixer des objectifs raisonnables en termes de clients présentés par an et par associé (en fonction de la taille du cabinet et du nombre de clients. L’exercice est plus facile lorsque le spectre de clients est large). Certains cabinets introduisent un avantage financier dans leur grille de rémunération à ceux qui jouent le jeu des présentations ;
  • – imaginer des formats d’intervention pour les associés nouvellement présentés auprès du client qui lui apporte directement de la valeur ajoutée (formations sur des thèmes qui l’intéressent particulièrement par exemple). L’associé introduit se sent immédiatement légitimé dans la démarche, le client en tire simultanément un avantage ;
  • – organiser des évènements autour de thèmes porteurs pour plusieurs expertises et présenter les clients entre eux (quand cela est possible …). L’avocat de demain sera aussi un « go between ». À ce titre, jouer la carte de la transversalité entre associés et y associer l’écosystème est un atout pour tous ;
  • – privilégier les petits comités… beaucoup plus propices aux échanges ! ;
  • – s’obliger à rentrer les données essentielles sur les nouveaux dossiers et clients dans une base de données commune lorsqu’elle existe. Trop peu de cabinets sont équipés ou utilisent les outils mis à leur disposition. Les rares qui s’astreignent à l’exercice ont une très grosse longueur d’avance en business développement ! ;
  • – optimiser les outils déjà existants en interne pour mieux se connaitre. Partager l’ensemble des enquêtes (Chambers, Legal 500, Décideurs, ODA…) sur un serveur commun, à titre d’exemple ;
  • – prendre le temps de bien transmettre les dossiers entre équipes d’avocats en interne ! Expliquer qui est son client et le travail qui a déjà été effectué par l’équipe en lien avec le client. Le manque de soin à la passation des dossiers est, en effet, un reproche récurrent de la part des clients de cabinets ! Qui est ce client ? Quels sont ses enjeux ? Quelles sont ses attentes potentielles vis-à-vis du cabinet ? Enfin, ne surtout pas oublier qu’il est plus facile d’étendre ses missions auprès d’un client satisfait que d’en démarcher un nouveau… et plus compliqué pour un client de se défaire d’une équipe que de plusieurs !